Tendances actuelles des architectes d’intérieur autour de la suspension luminaire design

Tendances actuelles des architectes d’intérieur autour de la suspension luminaire design

Tendances actuelles des architectes d’intérieur autour de la suspension luminaire design

La suspension luminaire, un objet au croisement du design et de la fonctionnalité

Longtemps cantonnée à sa seule fonction utilitaire, l’éclairage a vu son statut évoluer. Depuis quelques années, la suspension luminaire n’est plus seulement un point lumineux ; elle est devenue une pièce maîtresse de la décoration intérieure. Dans une époque marquée par une hybridation des styles, les architectes d’intérieur y voient un médium de caractère, capable d’ancrer un espace dans une atmosphère bien précise. Voyons comment les tendances actuelles en architecture intérieure confirment l’importance croissante de cet objet oscillant entre art, design et patrimoine.

Un héritage modernisé : les sources d’inspiration historiques

Contrairement à une idée reçue, les suspensions qui dominent la scène contemporaine ne sortent pas de nulle part. Elles s’arriment à des filiations précises. Le style Art déco, par exemple, avec ses formes géométriques et ses matériaux nobles (verre opalin, laiton, chrome), inspire de nombreuses créations actuelles. On retrouve également l’influence des luminaires du Bauhaus, avec leurs lignes épurées, leur recherche de fonctionnalité et leur clarté formelle.

Les designers d’aujourd’hui revisitent ces références pour les adapter aux espaces contemporains. La célèbre suspension « PH5 » de Poul Henningsen (1958), iconique du design danois, continue d’inspirer les architectes d’intérieur à la recherche d’un équilibre doux entre tradition scandinave et élégance internationale. À l’inverse, certaines créations puisent dans les volutes florales de l’Art nouveau, souvent en opposition avec des éléments minimalistes plus actuels.

Minimalisme vs. maximalisme : deux approches qui cohabitent

Actuellement, deux grandes tendances coexistent, parfois dans le même projet d’aménagement : le retour au minimalisme et l’essor du maximalisme assumé. Le minimalisme, hérité des traditions japonaises et du modernisme des années 50, privilégie les formes pures, les matériaux naturels (chêne brut, céramique mate) et les couleurs neutres. Les suspensions adoptées dans ce cadre se font discrètes, presque sculpturales — une simple sphère de verre dépoli suspendue à un câble en laiton peut suffire.

À l’inverse, le maximalisme contemporain favorise les compositions audacieuses, les accumulations d’éléments visuels et des suspensions surdimensionnées, jouant sur les contrastes de couleurs, de matières ou de formes. La suspension devient alors « statement piece », à la manière d’une œuvre d’art suspendue au plafond.

Ces deux approches ne s’excluent pas. Bien au contraire, il est fréquent de voir une suspension au design très présent dans un intérieur épuré, créant un jeu de tension propice à l’émergence d’une identité forte. Le projet de l’architecte Laurent D. dans un appartement haussmannien parisien en est un bon exemple : des moulures classiques, une palette de blancs cassés, et au centre du salon, une suspension contemporaine en bronze patiné aux allures végétales, comme un hommage discret à Hector Guimard.

Focus sur les matériaux : entre innovation et réappropriation

Le choix des matériaux dans la conception des suspensions reflète les préoccupations esthétiques et environnementales du moment. On observe une montée en puissance des matières recyclées ou naturelles, comme le lin tissé, le papier japonais (washi), le bois sculpté ou encore des fibres végétales telles que le raphia ou le jonc de mer. Ces matériaux confèrent aux luminaires une texture organique et une lumière douce, qualitative et apaisante.

D’autres designers préfèrent l’innovation technologique, jouant sur la translucidité des polymères, les LED intégrées et le contrôle intelligent de l’intensité via smartphone. Le studio français DCW éditions, par exemple, allie souvent ces deux angles en proposant des pièces qui rappellent l’âge d’or du design industriel tout en y ajoutant des fonctionnalités contemporaines.

Citons également la tendance au verre soufflé à la bouche, qui revient en force grâce à l’engouement pour l’artisanat d’art. La maison française Atelier George ou les pièces de Sophie Lou Jacobsen illustrent cette fascination pour le geste et la spontanéité du verre, chaque suspension devenant une pièce unique, littéralement façonnée par le souffle humain.

Suspension et narration : créer une ambiance avec un seul objet

Les architectes d’intérieur racontent de plus en plus des histoires à travers les objets. La suspension, en tant que point focal visuel, participe pleinement à cette narration. Elle peut évoquer un voyage (suspensions en terre cuite chamottée d’inspiration marocaine), une époque (formes en soucoupe volante des années 1960), une culture (lampes tressées africaines), ou un sentiment (lumière diffuse pour un effet cocon).

Dans un contexte où le concept de « home staging » laisse place à une personnalisation plus poussée des intérieurs, le choix d’une suspension devient stratégique. Elle doit résonner avec la personnalité des habitants, entrer en dialogue avec les autres éléments du mobilier, tout en permettant une mise en lumière valorisante des volumes de la pièce.

Faute de place, les architectes privilégient de plus en plus les modèles « multi sources » — c’est-à-dire des suspensions à bras articulés ou à câbles multiples — afin d’adapter l’orientation et la quantité de lumière selon le moment de la journée ou la fonction de la pièce. L’entreprise Flos, pionnière en la matière, propose notamment la suspension « Arrangements » d’Alexander McQueen, qui peut être configurée sur mesure avec différents modules géométriques imbriqués.

Quels modèles incontournables aujourd’hui ?

Parmi les suspensions les plus prisées aujourd’hui par les architectes d’intérieur, quelques noms reviennent avec insistance. En voici une sélection non exhaustive observée sur les derniers salons professionnels (Maison & Objet, Salone del Mobile…) :

  • Vertigo de Constance Guisset (2010) – Grand classique devenu presque iconique, ce modèle aérien en fibre de verre et polyuréthane se plaît autant dans un loft contemporain que dans un ancien atelier réhabilité.
  • IC Lights de Michael Anastassiades pour Flos – Fine et sophistiquée, elle joue sur l’équilibre précaire d’une sphère en verre dépoli suspendue à un bras métallique en laiton brossé, inspirée des mouvements d’un jongleur.
  • Ginger de Marset – Cette suspension en bois cintré et métal repose sur un disque ultra-plat qui assure une diffusion très homogène de la lumière, idéale au-dessus d’une table à manger.
  • Apiales de Nuura – Inspirée des inflorescences nordiques, cette suspension aux multiples bras métalliques présente une esthétique florale et symétrique très appréciée dans des contextes néo-classiques.

Conseils pour bien choisir sa suspension design

Choisir une suspension n’est pas qu’une question de goût ; c’est aussi une affaire de proportions, de hauteur sous plafond et d’ambiance lumineuse souhaitée. Voici quelques éléments que les architectes d’intérieur prennent systématiquement en compte :

  • La hauteur de la pièce : une suspension XXL dans un espace bas de plafond peut écraser visuellement la pièce.
  • Le diamètre de la suspension : il doit être proportionnel à la surface de la table ou de la zone éclairée. On recommande souvent un tiers de la largeur du meuble surplombé.
  • L’éclairement : une suspension purement décorative peut être complétée d’éclairages indirects pour un meilleur confort visuel.
  • Le style architectural : dans une maison des années 1930, une suspension Bauhaus d’époque ou bien inspirée de celle-ci crée un rappel cohérent ; dans une grange rénovée, on préfèrera une suspension en matériaux bruts et naturels.

Vers une collection de design contemporain ?

Fait intéressant : certaines suspensions récentes commencent déjà à entrer sur le marché des objets de collection. Si les grands noms du design moderniste (Gino Sarfatti, Verner Panton, Jean Prouvé…) sont déjà bien installés dans les catalogues des maisons de vente, certains designers actuels voient leurs éditions limitées devenir des pièces convoitées.

Des salons spécialisés, comme le PAD Paris ou la Design Miami/Basel, reflètent cet intérêt croissant pour les luminaires en tant qu’objets de collection. Pour les collectionneurs d’antiquités ouverts aux objets du XXIe siècle, ces suspensions design représentent une porte d’entrée vers les marchés de demain, notamment dans les ventes aux enchères dédiées au design contemporain.

En somme, la suspension design est bien plus qu’un accessoire. Elle est aujourd’hui un terrain d’exploration pour les architectes d’intérieur, un marqueur de style, et, parfois, un investissement patrimonial. On est bien loin de l’ampoule nue suspendue à un fil — et heureusement.